Comment maîtriser le développement de l’agriculture au Congo ?

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Les problèmes que rencontre le Congo dans le domaine agricole sont ceux de nombreux pays africains. Ces pays sont victimes d’une faible productivité et de l’insuffisante compétitivité de leur agriculture.

Faute de pouvoir résister à la concurrence des importations de produits agro-alimentaires en provenance des pays où l’agriculture est déjà grandement moto-mécanisée, de nombreux paysans quittent leurs villages d’origine et migrent vers les villes.

Certes, nos agricultures souffrent de devoir être pratiquées dans des conditions agro-écologiques très contraignantes ; mais les solutions techniques ne manquent pas cependant pour les surmonter avec succès et les paysanneries ont déjà maintes fois fait preuve d’un grand savoir-faire en la matière. Contrairement à une idée encore très largement partagée, ce n’est pas nécessairement en ayant recours à son tour à la motorisation de leur agriculture que les paysans africains pourront facilement combler leur retard de productivité.

Le risque est en effet de substituer purement et simplement des machines à la main-d’œuvre sans que celle-ci ne puisse trouver du travail rémunérateur. Le plus important serait plutôt de faire en sorte que nos paysans aient les moyens et l’intérêt de réorienter à leur profit les cycles biochimiques de l’eau, du carbone, de l’azote et de maints éléments minéraux, dans le cadre de systèmes de culture et d’élevage étroitement associés et respectueux des grands équilibres écologiques.

Des échecs et des réussites au Congo

Le projet «  grands villages agricoles » a été initié selon les orientations de notre Président de la République. Comme l’a rappelé Henri Djombo, notre Ministre d’Etat, Ministre de l’Agriculture, le projet était cohérent et sain au départ. Mais sa mise en œuvre sur le terrain a été souvent décevante car les agriculteurs et les éleveurs qui auraient pu apporter des éléments techniques et donner des solutions pertinentes n’ont pas été associés à la démarche. De plus, les matériaux utilisés pour les constructions n’étaient pas adaptés à notre zone écologique.

Dorénavant, il sera indispensable de développer ce type de projet en y associant les riverains et en exploitant des terres arables pour favoriser l’indépendance des villages. Ces derniers devraient pouvoir devenir auto-satisfaisants en produisant les céréales et les intrants nécessaires à l’élevage. Pour cela, il faudra mettre en place une autre organisation (ou « campement » pour employer le terme de notre Ministre de l’Agriculture) afin de développer de nouvelles filières plus rentables susceptibles d’améliorer le revenu des paysans.

Déjà, des réussites significatives ont pu voir le jour dans un domaine d’avenir : l’agriculture biologique. Ainsi, plus de 380 maraîchers de Brazzaville sud produisent désormais des légumes issus de l’agriculture biologique à l’issue d’une formation de deux ans et initiée par le Projet d’appui au maraîchage, à la transformation agro-alimentaire et à la commercialisation des produits transformés à Brazzaville, ce qui m’a réjoui personnellement, pour moi qui suis issu d’une famille de maraîchers.

La formation a conduit les maraîchers à adopter de nouvelles techniques de fertilisation, à l’instar des dispositifs de bio activateur de croissance, de protection des cultures à travers des pesticides naturels, de nouvelles modalités de pépinière et bien d’autres innovations.

Derrière une volonté affichée de mettre en place une agriculture biologique, c’est un engagement encourageant pour le moment dès lors que 23% seulement de ces maraîchers sur les 384 agriculteurs n’ont pas encore fidèlement adopté les techniques biologiques.

Initiée selon la méthodologie «  Formation Agricole Participative », la formation rend désormais les maraîchers «  producteurs  » et «  entrepreneurs ». La mise en place d’innovations techniques, comme la maîtrise de la pépinière sur pilotis, et d’activités productives d’intérêt collectif devraient aider à pérenniser la production en toutes saisons. Le but est de briser le mythe selon lequel au Congo les légumes coûtent cher pendant la saison des pluies.

Les conditions d’un développement de notre modèle agricole

Notre pays doit viser la sécurité nutritionnelle et l’autosuffisance alimentaire. Notre gouvernement est prêt à mettre en place les moyens pour encourager les grands investissements et pour aider les petits producteurs car le problème est d’abord celui de l’encadrement et du financement. Il faut favoriser un accès aux entrants, aux marchés et aux technologies. Pour cela, le gouvernement est en train de créer deux agences de développement : l’une pour l’agriculture et l’élevage, l’autre pour la pêche et l’aquaculture. Pour apporter les crédits de proximité aux paysans, il sera indispensable de restructurer rapidement le secteur bancaire de façon à ce que les banques puissent remplir efficacement leurs missions d’aide au développement de l’agriculture.

S’il est juste d’affirmer qu’il existe des solutions techniques pour résoudre les problèmes agricoles, il est vrai qu’elles ne pourront être effectivement mises en œuvre que si sont préalablement réunies un certain nombre de conditions économiques, sociales et politiques ; parmi lesquelles il convient de citer surtout :

–           La mise en place de politiques de recherche et développement technologiques plus respectueuses des savoir-faire paysans et de l’autonomie des producteurs dans le choix et la conduite des assolements, rotations de cultures, ateliers d’élevage et itinéraires techniques ;

–           La sécurisation des droits d’accès et d’usage au foncier et aux ressources naturelles ; c’est tout à fait possible au Congo pour ce qui concerne les terres qui sont régies par le droit coutumier mais c’est également concevable dans le domaine rural qui relève de la propriété publique. Dans ce cas, c’est l’Etat seul qui a le monopole d’affecter les terres aux exploitants ;

–           La redistribution du foncier agricole au profit des paysans pauvres afin de ne pas faire obstacle à la justice sociale et à l’intensification durable des systèmes de culture et d’élevage ;

–           Enfin la protection des agricultures vivrières à l’égard des importations en provenance des pays à agricultures déjà hautement productives et subventionnées, par le biais des droits de douanes conséquents, afin que les paysans du Congo puissent très vite bénéficier de prix plus rémunérateurs, incitatifs et stables.

Roger Ndokolo,

Président du parti du centre UNIRR

(Union pour la Refondation Républicaine)

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