Apple accusé par la RDC d’utiliser des minerais « exploitées illégalement »

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Mandatés par le gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC), les cabinets internationaux d’avocats Amsterdam & Partners LLP (Washington DC/London) et Bourdon & Associé (Paris) ont publié, le 22 avril 2024, un rapport dénonçant l’exploitation illégale des minerais dans le pays, intitulé « Minerais de sang – Le blanchiment des 3T de la RDC par le Rwanda et des entités privées ». Le document officiel révèle de graves violations des droits humains dans les régions minières de la RDC et souligne la complicité silencieuse de la communauté internationale face aux massacres dans l’est du Congo.

Est-ce le début d’un bras de fer judiciaire entre le groupe Apple et la République démocratique du Congo ? La firme à la pomme est accusée par Kinshasa d’utiliser des minerais issus de ses mines, mais « exploitées illégalement ». L’État congolais dénonce les « nombreuses violations de droits humains » qui s’y dérouleraient.

Les avocats mandatés par le gouvernement ont adressé des mises en demeure au géant américain du numérique. L’une à la maison mère d’Apple en Californie, l’autre à deux de ses filiales françaises. Kinshasa accuse la firme à la pomme d’utiliser des minerais stratégiques exploités illégalement en RDC par des milices armées soutenues par le Rwanda. Dans des mines où « travaillent des enfants » et des « civils sous la contrainte », selon eux.

S’appuyant sur ce rapport, les avocats Robert Amsterdam et William Bourdon ont formellement mis en demeure Apple, exigeant du directeur général Tim Cook des réponses claires concernant l’utilisation par la société de minerais 3T (étain, tantale et tungstène) extraits illégalement en RDC. Apple a trois semaines pour répondre à cette mise en demeure, qui questionne également la véracité des affirmations de l’entreprise sur la vérification de l’origine de ces minerais, souvent achetés via le Rwanda qui ne produit quasiment pas de ces ressources.

Cette action révèle les incohérences dans la chaîne d’approvisionnement des minerais 3T, cruciaux pour l’industrie de l’électronique, de l’automobile, de l’aviation et des énergies renouvelables, et souvent entachés par des pratiques de blanchiment d’argent via la contrebande. Ces pratiques financent des groupes armés, aggravant les crises humanitaires et environnementales en RDC.

« Nous posons une liste de questions aux sociétés concernées au regard de leur propre engagement de traçabilité. Il y a en creux un décalage entre le dispositif que prétend avoir mis en œuvre Apple et la réalité. Et l’on dit à Apple que l’on se réserve toute voix de droit, c’est-à-dire que toutes les options judiciaires sont sur la table », a expliqué William Bourdon, l’un des avocats mandatés par Kinshasa.

Contacté par nos confrères de Radio France internationale (RFI), le groupe Apple n’a pas répondu à leurs sollicitations, mais a notamment renvoyé l’Agence France-Presse à son rapport annuel de 2023. Dans ce rapport, Apple a indiqué n’avoir « aucune base raisonnable » pour conclure que sa chaîne d’approvisionnement a « directement ou indirectement financé ou profité à des groupes armés en RDC ou dans un pays limitrophe ».

Le sous-sol de la RDC regorge de minerais, le pays étant notamment le premier producteur mondial de cobalt et le premier producteur africain de cuivre. Le gouvernement de la RDC, sous la direction du président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, manifeste ainsi sa volonté de négocier sérieusement à l’international pour mettre fin à l’extraction et la commercialisation illicites des ressources naturelles, avant d’envisager des actions en justice.

Signalons que les avocats mandatés pourront entreprendre des actions légales appropriées si les réponses d’Apple s’avèrent insatisfaisantes après le délai imparti.

Moctar FICOU / VivAfrik

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