Selon une étude rendue publique dans la revue Nature mercredi 10 janvier 2017, les éléphants, les hippopotames, les buffles, les zèbres, les gnous, les grands mammifères africains etc. payent le plus lourd tribut en cas de conflits armés dans des zones de combat à tel point que l’on estime que ces animaux sont sous le diktat de l’extinction.
Les signataires de cette étude notent que 71% des zones protégées africaines ont été touchées par des conflits entre 1946 à 2010, parfois pendant des années. Précisant que les éléphants sont abattus pour leur ivoire qui finance les combattants, les antilopes sont chassées pour leur viande par des populations affamées : les grands animaux d’Afrique sont toujours des victimes collatérales de ces conflits, alors que certains périssent aussi directement sous les balles. « Les trajectoires des populations sauvages déclinent avec l’augmentation de la fréquence des conflits », peut-on lire sur l’étude basée sur l’évolution de 253 populations de 36 espèces de grands mammifères herbivores, dans 126 zones protégées de 19 pays africains. Si l’on se fie aux deux auteurs du texte qui ignorent le nombre total d’animaux disparus à cause des conflits, quelle que soit leur intensité (mesurée en nombre de morts humains), même une augmentation « minime » de la fréquence des guerres conduit ces populations sauvages sous le seuil de remplacement sans distinction d’espèces. « On pourrait s’attendre à ce que les éléphants soient plus touchés en raison de la valeur au marché noir de leurs défenses, mais il s’avère que l’effet du conflit demeure pour les autres animaux, buffles, zèbres, gnous, girafes, et beaucoup d’espèces d’antilopes, quand on enlève les éléphants des données », dixit Joshua Daskin, qui a conduit ces recherches à l’université de Princeton. Les scientifiques ont aussi passé au peigne fin d’autres indicateurs connus pour leur impact sur la faune (fréquence des sécheresses, taille des zones protégées, densité de population humaine, présence d’industries d’extraction…), mais aucun n’a d’effet aussi déterminant que la fréquence des conflits. Pour certaines études, au niveau local, une guerre peut avoir à la fois des impacts négatifs (munitions, braconnage pour la viande ou le trafic) et positifs (moins de pression humaine sur les zones protégées, déclin des industries extractives) sur la faune.
Le Mozambique s’est montré très entreprenant dans ce combat contre l’extinction de la faune sauvage en zones de conflits. Des mesures adéquates de leur récupération demeurent. « Un effondrement total des populations est rare, montrant que la faune ravagée par la guerre peut s’en remettre », note l’étude, qui insiste notamment sur l’importance de mesures rapides après un cessez-le-feu. Dans ce cas de figure, l’exemple le plus illustratif est celui du Mozambique. Selon ces auteurs, l’exemple du parc national de Gorongosa dans ce pays où ils ont travaillé, plus de 90% des grands mammifères avaient disparu suite aux guerres qui ont ravagé le pays entre 1977 et 1992, mais « la faune sauvage est revenue à environ 80% des niveaux pré-guerre », souligne Daskin.
Moctar FICOU / VivAfrik