Le digital, accélérateur et opportunité pour la RSE et les ODD en Afrique

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Par Pierre-Samuel Guedj

N° 131 – juin 2019 dans A la une, Pierre-Samuel Guedj

Numérique et Développement :                

L’Afrique est réellement devenue LA terre de tous les leapfrogs, ces sauts technologiques qui permettent d’éviter des étapes intermédiaires longues et coûteuses en ressources pour développer des infrastructures de développement économique stratégiques.

La téléphonie, comme l’accès à l’énergie, en est un exemple emblématique. Passer directement au réseau mobile est une alternative au développement d’un réseau filaire, long, coûteux et illusoire face à la pénurie de cuivre.

Idem pour le système bancaire, avec le Mobile Banking qui a permis à Orange de créer un nouveau business model le positionnant en quelques années comme un opérateur financier majeur en s’affranchissant de développer un réseau d’agences bancaires. Le groupe développe même maintenant une solution complémentaire d’accès à l’énergie. Le secteur agricole n’est pas en reste tant l’accès et le traitement des datas offre aux agriculteurs des solutions de prévisions météorologiques, de gestion optimale de leurs intrants, de suivi de leur production mais aussi un accès en temps réel aux cours des marchés, permettant de vendre au meilleur prix face à des intermédiaires parfois affabulateurs.

Les gouvernants ne s’y trompent pas, en développant des plans numériques importants et en se dotant de programmes d’accompagnement. Tout en limitant parfois l’accès aux réseaux sociaux, en période électorale notamment…

Numérique et facilitation d’une gestion positive des enjeux ESG

Parce qu’il a un fort potentiel en termes de développement d’emplois, mais aussi de régulation éthique ou d’accompagnement vers une transition positive, inclusive et responsable, le numérique devient l’allié incontournable des ODD.

Le numérique est un vecteur de droits fondamentaux. En permettant d’établir des cadastres il contribue à la reconnaissance et à la garantie des droits fonciers, questions fondamentales sur ce continent.

Le numérique contribue aussi à la sortie de l’économie informelle en cadrant les transactions commerciales et facilitant ainsi la collecte de l’impôt. Sans parler du potentiel éthique des applications de dénonciation de la corruption qui ont fleuries ces dernières années…

L’accès au WIFI devient presque un droit fondamental aussi essentiel que l’accès à l’eau !!!

Numérique et RSE, local content et extra local content

Dès lors, c’est aussi une opportunité pour les entreprises qui opèrent en Afrique d’inscrire le numérique dans leur RSE, de leur local content jusqu’au développement de leur extra local content.

RSE et Numérique sont de plus en plus au cœur des nouveaux modes de collaboration avec les acteurs en Afrique afin de répondre aux attentes de développement inclusif formulés par les Etats. Se profilent ainsi de nouveaux facteurs de différenciation et potentiellement de préférence au regard de compétiteurs moins exigeants sur les enjeux de droits humains et d’éthique dans les affaires.

Le défi réside dans le développement d’initiatives variées générant des impacts positifs en adéquation avec le business model des entreprises.

Ainsi, de nombreuses sociétés de services notamment se sont engagées dans des initiatives d’aide à l’entrepreneriat et à la création d’entreprise, en apportant dans le cadre de FabLab ou d’espace de coworking,  coaching, mentoring, services et accès aux nouvelles technologies. Certains articulent pleinement leurs métiers et besoins dans le cadre de codéveloppement d’écoles de formation au numérique et notamment au coding, comme Orange l’a illustré avec l’ONG Simplon.

Pour les acteurs du secteur extractif le numérique devient notamment un levier facilitant l’accès à des services de santé en ligne ou de formation des populations riveraines. Autant de facteurs d’une meilleure acceptation locale et de pérennité de leurs activités. Ces mêmes acteurs mettent par ailleurs en place des dispositifs d’information, de dialogue et d’alertes sur les éventuels incidents environnementaux, comme celle d’Ulula, favorisant ainsi les relations avec les populations locales.

Quant à l’exigence de tracabilité des chaines d’approvisionnement, devenue un impératif dans le cadre du devoir de vigilance des entreprises donneuses d’ordres, la technologie blockchain y apporte de nouvelles réponses en plein développement.

Mais pour réussir, ce potentiel appelle à une mobilisation multi-acteurs contribuant à l’émergence d’eco-systèmes locaux sur la base de partenariat public-privé inclusif, territoriaux et durables. 

Par Pierre-Samuel Guedj

Président d’Affectio Mutandi

Président de la Commission RSE du CIAN – Conseil Français des Investisseurs en Afrique.

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