Le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) a organisé, le 3 décembre 2024 à Rabat au Maroc, un événement majeur réunissant des compagnies d’assurance internationales, des agences de crédit à l’exportation (ECA) et des investisseurs institutionnels pour explorer des solutions innovantes en matière de partage des risques. Cette rencontre faisait partie des Market Days 2024 de l’Africa Investment Forum et marquait la première édition de la Journée des assureurs et des ECA, un événement inédit sur le continent africain.
L’objectif de cette journée était de renforcer l’engagement de la Banque africaine de développement à attirer des financements à grande échelle pour l’Afrique. Plusieurs sessions ont permis aux participants de découvrir la stratégie de la Banque, les perspectives économiques de l’Afrique et les opportunités de collaboration sur des projets de financement souverains et non souverains, en mettant l’accent sur la gestion des risques et la performance des portefeuilles. Parmi les intervenants et participants figuraient des représentants de grandes entreprises telles qu’Axa, Allianz, Marsh, Chubb, ainsi que des institutions financières majeures telles que LGIM, Sinosure et la Banque de commerce et de développement.
Sous la direction de hauts responsables du Groupe de la Banque africaine de développement, notamment la première vice-présidente Marie-Laure Akin-Olugbade et la vice-présidente aux Finances et directrice financière Hassatou Diop N’Sele, l’événement a offert aux participants un aperçu global des activités de la Banque et a permis d’explorer des solutions de financement innovantes.
Lors de l’ouverture, Mme N’Sele a souligné l’urgente nécessité de combler le déficit d’investissements dans les infrastructures en Afrique. Actuellement, les investisseurs privés financent seulement 10 % des infrastructures en Afrique, un chiffre bien inférieur à celui observé en Asie. L’Afrique a besoin de 1 300 milliards de dollars par an pour atteindre ses Objectifs de Développement Durable d’ici 2030. Dans ce contexte, elle a mis en avant l’engagement de la Banque à augmenter sa capacité financière de 73 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie, en tirant parti des assureurs et des ECA grâce à des approches de structuration innovantes.
L’événement a permis des discussions approfondies sur les tendances émergentes du financement du développement, telles que la montée en puissance des prêts non liés et l’évolution des produits des agences de crédit à l’exportation. En 2023, les volumes de couverture non liée ont augmenté de 30 %, ce qui a permis une plus grande flexibilité dans la manière dont les ECA soutiennent le financement du commerce et du développement. Mme N’Sele a précisé que les investisseurs institutionnels mondiaux, qui gèrent des actifs supérieurs à 100 000 milliards de dollars, pourraient jouer un rôle clé dans le financement des infrastructures africaines. Attirer même une petite partie de ces fonds pourrait contribuer de manière significative à combler le déficit de financement.
Les discussions ont également mis en lumière le rôle croissant du Fonds africain de développement (FAD) de la Banque africaine de développement, qui vise à obtenir une notation AAA d’ici 2025-2026. Cela renforcerait la capacité du Fonds à mobiliser des assureurs pour des transactions de prêts souverains tout en consolidant la capacité de prêt pour plus de 30 pays membres du Fonds.
Des sessions spécifiques ont permis de discuter des partenariats entre les banques multilatérales de développement, les assureurs et les ECA, notamment à travers des structures par tranches et de première perte. L’une des sessions les plus marquantes a concerné l’opération « Room 2 Run Sovereign », lancée en 2022 par la Banque, qui a permis à un groupe d’assureurs de prendre une position de première perte sur un portefeuille de prêts souverains d’une valeur allant jusqu’à 400 millions de dollars.
Paul Heaney, secrétaire exécutif de l’Union de Berne, a noté dans sa présentation que les investissements à long terme en Afrique par les fournisseurs d’assurance-crédit augmentaient et se diversifiaient, avec des pays comme l’Angola, l’Égypte, la Côte d’Ivoire, l’Éthiopie et le Mozambique en tête des zones d’investissement. Il a également souligné que le risque perçu en Afrique est souvent surestimé, bien qu’un soutien souverain solide soit crucial pour la réussite des investissements.
L’événement a également mis en évidence comment les partenariats entre la Banque, les assureurs et les ECA peuvent élargir l’accès à des financements abordables, en particulier dans un contexte de volatilité des marchés mondiaux. La Banque africaine de développement prévoit de renforcer la mobilisation des assureurs et des OCE dans le cadre de son plan d’action pour accroître le financement du développement en Afrique.
Marie-Laure Akin-Olugbade, première vice-présidente du Groupe, a souligné l’importance de la participation des ECA et des assureurs à l’Africa Investment Forum (AIF), souvent pour la première fois, notant que cet événement correspond parfaitement aux objectifs des journées transactionnelles de l’AIF. Le thème 2024 du Forum, « Tirer parti de partenariats innovants pour passer à l’échelle », met en lumière le rôle essentiel des compagnies d’assurance en tant qu’investisseurs clés dans des projets prometteurs.
Moctar FICOU / VivAfrik