Le partage des résultats du projet ISRA-KOPIA a servi de prétexte au Laboratoire national de recherches sur les productions végétales (LNRPV) de l’Institut sénégalais de recherche agricole (ISRA) et la direction de KOPIA au Sénégal d’organiser une visite essentielle, lundi 24 février 2025 à Dakar, afin de partager les résultats du projet « Développement d’une technologie de production de semences de pommes de terre exemptes de maladies au Sénégal ». Ce projet phare, qui met en œuvre des méthodes innovantes de production sous serre hydroponique, est un levier stratégique pour renforcer l’autonomie du Sénégal dans la production de semences de pommes de terre de qualité. L’événement est marqué par la présence de personnalités de haut niveau, dont l’Ambassadeur de Corée du Sud à Dakar, Kwon Hyuk-woon, ainsi que des autorités institutionnelles sénégalaises.
Contexte et enjeux du projet
Le secteur agricole sénégalais, particulièrement la culture de la pomme de terre, souffre d’une dépendance importante vis-à-vis des semences importées, souvent contaminées par des virus et d’autres maladies. Cette situation compromet la qualité de la production locale, entraîne des coûts supplémentaires et limite les rendements des producteurs. En réponse à cette problématique, le gouvernement sénégalais, en collaboration avec des partenaires internationaux comme KOPIA et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a initié un programme ambitieux visant à développer des technologies de production de semences locales saines et certifiées.
Le projet en question a pour objectif de produire des semences de pommes de terre exemptes de maladies en utilisant des techniques avancées telles que la culture hydroponique sous serre. Ce système permet non seulement de contrôler l’environnement de culture mais aussi de réduire les risques de transmission de maladies, garantissant ainsi des semences de qualité supérieure. La Phase 2 de ce projet marque une étape décisive dans la réalisation de l’autonomie en semences horticoles, une priorité pour l’agriculture sénégalaise.

La visite de partage des résultats : un moment décisif
Lors de la visite organisée le 24 février 2025, les invités ont eu l’opportunité de découvrir les résultats encourageants du projet, notamment les semences de pré-base produites sous serre. L’Ambassadeur de Corée du Sud, Kwon Hyuk-woon, s’est exprimé sur l’importance de ce projet pour le Sénégal. A cet effet, il souligne : « je suis très content d’être ici parmi vous en compagnie des partenaires du projet à savoir la FAO, l’ISRA et KOPIA. Nous avons vu les résultats encourageants du projet de développement des semences de pommes de terre. Le constat est que le Sénégal a besoin de semences de qualité pour produire plus de pommes de terre de bonne qualité avec des prix moins chers. Un pas en avant mais on doit continuer à engager d’autres partenaires qui pourront aider à produire plus de semences de bonne qualité au Sénégal ».
Cette déclaration illustre l’importance de la collaboration internationale dans le soutien à l’autosuffisance en semences de qualité et la nécessité d’élargir le cercle des partenaires pour faire face aux défis de production à grande échelle.
Les avancées et les défis à relever, selon les experts sénégalais
Le directeur scientifique de l’ISRA, Dr Madiama Cissé, a mis en avant les progrès réalisés, tout en rappelant l’ampleur des défis qui restent à surmonter. Selon lui « nous avons pris connaissance du travail important qui est en train d’être fait par rapport à la production de semences de pommes de terre. Comme vous le savez, une infime partie des semences que nous utilisons au Sénégal est produite localement. Donc la quasi-totalité est importée. Aujourd’hui, dans ce processus-là, le premier maillon de la production de semences qui commence par les semences de pré-base, nous venons de prouver, par des méthodes éprouvées, que ce maillon de la chaîne de production de semences de pré-base peut-être correctement assuré en produisant des semences de pomme de terre exemptes de tout virus ».
Dr Cissé a souligné que le défi majeur demeure la production à grande échelle de semences certifiées et de qualité, ainsi que la question de savoir qui prendra le relais de l’ISRA pour assurer cette production. Il a ainsi proposé que les organisations de producteurs et le secteur privé sénégalais et international puissent investir pour continuer à développer ce domaine crucial. L’ISRA demeure en effet le moteur de cette innovation, mais la pérennité du modèle passe par une implication plus large.
Les apports de la FAO et les défis de la certification

Le rôle de la FAO dans ce partenariat est essentiel pour accompagner le développement de l’infrastructure nécessaire à la production et à la certification des semences de qualité. Dr Yassine Badiane Ndour, de la FAO Sénégal, a déclaré que « déjà, se réjouir des résultats de ce partenariat entre l’ISRA et la coopération coréenne à travers KOPIA. Je pense qu’il y a eu de très bons résultats concernant la culture d’abris connexe des semences de pré-base. Le défi est de passer maintenant à l’échelle pour produire des semences certifiées qui pourront être distribuées aux producteurs. Et parmi les défis, il faut d’abord trouver des producteurs qui puissent faire la production des semences, les former mais également tout ce qui est conditionnement et conservation des semences ».
Il a insisté sur l’importance de la réfrigération et des méthodes de conservation adaptées pour garantir la viabilité des semences de pommes de terre à long terme. Il a également rappelé que la FAO a soutenu l’ISRA à travers des équipements et une assistance technique, et a collaboré avec le contrôle des semences pour garantir que celles-ci soient certifiées avant leur distribution.
Vers l’autosuffisance en semences de qualité
L’aboutissement de cette initiative pourrait marquer un tournant majeur pour l’agriculture sénégalaise, en permettant au pays d’atteindre l’autosuffisance en semences de pommes de terre, tout en réduisant la dépendance vis-à-vis des importations. Toutefois, comme l’ont souligné les intervenants, il reste encore de nombreux défis à relever, notamment sur la production à grande échelle, le financement et la formation des producteurs locaux pour faire face à ces exigences.
Le Sénégal pourrait faire un grand pas vers l’autosuffisance semencière, et l’engagement des différents acteurs – gouvernement, KOPIA, ISRA, FAO et secteur privé.
Moctar FICOU / VivAfrik