Les pays développés ont-ils comme devis le non-respect de leurs engagements quand il s’agit de financer ceux en voies de développement ? Tout porte à le croire. En effet, les 100 milliards $ qui entrent dans le cadre de la réallocation des Droits de tirage spéciaux (DTS) promis aux pays pauvres peinent toujours à être mobilisés.
Rappelons qu’en août 2021, le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé l’allocation de 650 milliards $ de DTS pour relancer l’économie mondiale, promettant de permettre aux pays pauvres d’avoir accès à 100 milliards $ grâce à un principe de solidarité. Le constat est amer. Six mois plus tard, seulement 60 milliards $ ont été annoncés par les pays riches.
650 milliards de Droits de tirage spéciaux ont été alloués, en 2021, par le Fonds monétaire international à la relance de l’économie mondiale après la pandémie de Covid-19. Face à la faiblesse des parts censées être redistribuées aux pays pauvres, les pays du Nord avaient alors convenu de mobiliser 100 milliards pour soutenir la relance dans les pays du Sud en renonçant à une part de leurs DTS, a rappelé à Ecofin, Moutiou Adjibi Nourou.
Selon l’agenceecofin.com, plus de six mois après l’opération du FMI, les promesses des pays riches semblent être restées dans les placards, les fonds promis n’ayant toujours pas été mobilisés. Depuis l’allocation des 650 milliards $ du FMI, seuls quelques pays ont fait des annonces publiques de renonciation à cet effet.
Le Canada, la France et le Royaume-Uni ont ainsi annoncé qu’ils réorienteraient 20% de leurs allocations de DTS vers les pays en voie de développement, ce qui représente un total de 14 milliards $. Le Japon, de son côté, a promis 4 milliards $ (soit seulement 10 % de son allocation). En novembre 2021, le G20 a indiqué que 45 milliards $ ont déjà été mobilisés dans le cadre du processus. Quelques jours plus tard, c’est la Chine qui a officiellement promis qu’elle renoncera à 10 milliards $ de ses DTS au profit des pays africains, a détaillé Moutiou Adjibi Nourou.
Qui souligne que, malgré ces annonces, de nombreuses puissances économiques telles que l’Allemagne, les USA, ou la Russie n’ont toujours pas fait d’annonces publiques. D’après Kristina Georgieva, directrice du FMI, le montant des annonces faites par les pays riches est d’environ 60 milliards $ à ce jour, soit 40 milliards $ de moins que l’objectif fixé. Un objectif qui pourrait mettre encore plus de temps à être atteint si l’on considère le délai que mettront ces fonds à être effectivement décaissés une fois mobilisés.
Lors de la conférence de presse conjointe organisée vendredi 18 février 2022, dans le cadre du 6ème Sommet Union européenne (UE) – Union africaine (UA), le président français, Emmanuel Macron, a confirmé, au nom de ses partenaires, l’engagement de réallouer une partie de leurs DTS en faveur des pays africains. Cependant, non seulement aucun calendrier clair n’a été annoncé par le chef d’Etat de la France qui est également l’actuel président en exercice de l’UE, mais aussi, il a indiqué que la mobilisation de ces fonds pourrait être réalisée selon des mécanismes différents pour certains pays.
Sur ce point précis, Emmanuel Macron a laissé entendre : « en termes de financement des économies africaines, nous avons vraiment conduit un travail qui est encore à finaliser. Mais d’abord pour confirmer l’engagement de réallouer les DTS à hauteur de 20% pour les puissances qui sont les nôtres, et donc permettre d’arriver à cet objectif de 100 milliards vers les pays les plus pauvres, vers le continent africain. Dans ce contexte-là, plusieurs pays utiliseront des techniques différentes, certains vont à nouveau allouer leurs DTS, d’autres auront des mécanismes de prêt, mais nous arriverons à cet objectif ».
D’après l’ONG Global Citizen, il urge d’accélérer les efforts de mobilisation des 100 milliards $ promis afin de faire face à des défis qui s’amplifient chaque jour un peu plus en Afrique et dans les pays pauvres en général. « Cet objectif a été inspiré par l’impact colossal de la pandémie de covid-19 sur les économies du monde entier. Mais il existe d’autres arguments pressants en faveur de la réaffectation des DTS, tels que l’escalade de la crise climatique et la nécessité de protéger les systèmes de santé des pays à faible revenu contre les pandémies » indique l’organisation.
Rappelons que 33 milliards $ sur les 650 milliards décaissés par le FMI étaient destinés aux pays africains suivant leurs quotes-parts normales. Pourtant, l’année dernière, le FMI a estimé à au moins 425 milliards $ le montant des financements nécessaires sur le continent pour accroître les dépenses de lutte contre la pandémie et le terrorisme, tout en maintenant des réserves suffisantes et en accélérant la reprise économique sur les cinq prochaines années. Un montant qui reste difficile à mobiliser en raison des contraintes de financement rencontrées par les pays africains.
Moctar FICOU / VivAfrik