Non au mégaprojet pétrolier de TotalÉnergies en Ouganda. C’est la thèse défendue par quatre militants environnementaux ougandais qui ont été reçus à l’Assemblée nationale française mercredi 16 mars 2022. Mieux, pour contrer ce géant projet pétrolier en Ouganda, les activistes se veulent le porte-voix des personnes affectées. À Paris, ils ont appelé l’État français à « sortir du silence ». L’entreprise entend investir dans les entreprises locales et créer des milliers d’emplois. Mais le risque pour l’environnement et les communautés locales inquiète.
Expulsions, arrestations, destruction de parcs nationaux… « En Ouganda, Total brise nos vies », dit à Reporterre Maxwell Atuhura, opposant aux projets Tilenga et East African Crude Oil Pipeline (EACOP), portés par TotalÉnergies et la compagnie chinoise China National Offshore Oil Corporation (CNOOC).
Signalons que depuis le 11 mars et ce, jusqu’au 24 mars 2022, plusieurs représentantes et représentants de la société civile ougandaise sont en France et en Europe. De la marche climat parisienne le 12 mars de l’année — où ils ont étrenné un faux pipeline géant de plusieurs mètres — aux conseillers d’Emmanuel Macron à l’Élysée, en passant par des rapporteurs spéciaux de l’Organisation des Nations unies (ONU) à Genève et le pape à Rome, ils font entendre leur opposition à ces mégaprojets de la compagnie française.
Parmi les activistes : Maxwell Atuhura, directeur de l’organisation Tasha Research Institute, basé au plus près des communautés affectées dans la zone pétrolière, qui avait été arbitrairement arrêté et détenu en mai 2021 ; et Hilda Flavia Nakabuye, jeune fondatrice de Fridays For Future Uganda et l’une des figures internationales des grèves des jeunes pour le climat.
Malgré ces inquiètudes, TotalÉnergies assure que son projet pétrolier se fera dans le respect des communautés locales, et des mesures « strictes » de protection de l’environnement seront prises. Le groupe prévoit d’investir plusieurs milliards d’euros pour plus de 400 forages et un oléoduc de 1 450 kilomètres. Selon TotalÉnergies, 1,7 milliard d’euros ira aux entreprises locales de construction, et à terme, plus de 3 000 emplois directs et indirects seront créés, a relayé RFI.
Mais les militants demandent une stratégie plus « écologique » au profit de l’Ouganda. Dans les faits, les militants comme Diana Nabiruma dénoncent surtout des déplacements de population sans contrepartie et une pollution importante. « Nous avons assurément besoin d’investissements dans notre pays car nous voulons nous développer. Mais l’Ouganda a tellement de potentiel dans les énergies renouvelables dans lesquelles on pourrait investir. Donc nous voulons mobiliser l’Assemblée nationale française, les députés, le gouvernement pour qu’ils poussent TotalÉnergies à revoir sa stratégie et la rendre écologique », a dénoncé Nabirum à RFI.
Selon les écologistes, le rôle du gouvernement français divise. Car, seule une poignée de députés est venue entendre son message. C’est le cas de Matthieu Orphelin, élu écologiste de l’opposition. Il dénonce le soutien de TotalÉnergies par la diplomatie française. « On ne peut qu’être furieux quand on entend les activistes nous raconter la réalité de ce qu’ils vivent sur le terrain en terme d’impact dû au changement climatique mais aussi en terme d’expropriation et de non-respect des droits humains. J’ai très bon espoir qu’on arrive à mobiliser quelques dizaines de députés sur ce sujet-là et qu’on dise au gouvernement de prendre ses responsabilités. »
À l’initiative de M. Orphelin, nous avons rencontré ce matin des représentants de la société civile ougandaise pour entendre leurs témoignages sur les impacts dévastateurs pour l’environnement et les droits humains des projets Tilenga & EACOP de Total en Ouganda.
Après les députés, les activistes ougandais iront plaider leur cause devant des banques et des conseillers du gouvernement et du président français, mais aussi auprès de l’Organisation des Nations unies (ONU) à Genève. Ils doivent également rencontrer le pape à Rome.
Les activistes dépeignent ainsi un projet pétrolier démesuré, « qui va complètement saper les efforts de réduction des émissions mondiales pour lutter contre le changement climatique », a déploré Hilda Flavia Nakabuye, 24 ans. Avec Tilenga, la multinationale française prévoit de forer plus de 400 puits de pétrole situés dans les roches du rift albertin et, pour un tiers d’entre eux, au cœur de l’aire naturelle protégée de Murchison Falls en Ouganda.
Moctar FICOU / VivAfrik


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