L’agriculture africaine peine à prendre son envol depuis belles lurettes. Hormis les changements climatiques, le stress hydrique, la dégradation des sols… qui entravent son développement, les prix hors de portée des nouvelles variétés de semences générées par les centres de recherche agricoles freinent également leur diffusion à grande échelle.
Mais pour faire face aux effets néfastes du changement climatique et améliorer les rendements des agriculteurs du continent noir, le Conseil ouest et centre africain pour la recherche et le développement agricole (CORAF), en collaboration avec les instituts de recherche nationaux, ont développé plusieurs technologies qui peinent cependant à être adoptées à grande échelle, a reconnu le gestionnaire de programme au CORAF et actuel directeur de la recherche et de l’innovation par intérim, Dr Niéyidouba Lamien.
De l’avis de M. Lamien, « les innovations technologiques dans le domaine de l’agriculture ne sont pas adoptées comme nous l’aurions souhaité. Leurs prix semblent être la principale raison. Comme la plupart, nos producteurs ont un pouvoir d’achat limité, acquérir ces technologies leur pose souvent un énorme problème ».
« Les technologies ne sont pas appropriées parce qu’il y a un problème de coût. Beaucoup d’entre nous ne peuvent pas se les procurer », a pour sa part indiqué le président du Réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPA), Mamadou Cissokho.
Les deux acteurs s’exprimaient, mercredi 2 novembre 2022, à Dakar lors de la cérémonie d’ouverture de la foire du Marché des innovations et des technologies agricoles (MITA).
Soulignant la nécessité de subventionner ces semences pour les rendre plus accessibles, le Dr Niéyidouba Lamien a renchéri que « la solution doit être politique. Les gouvernements font beaucoup de subventions. Mais celles-ci restent toujours limitées. Il faut davantage de moyens pour les gouvernements pour couvrir la majorité des producteurs ».
Rappelons que ces dernières années, l’Etat du Sénégal a mis plusieurs tracteurs à la disposition des agriculteurs et il prévoit d’en acheter d’autres. Mais pour M. Cissokho, « au lieu d’amener des tracteurs partout, l’Etat peut décider de subventionner une technologie adoptée par les agriculteurs » afin de permettre à ceux qui en ont déjà d’améliorer leurs rendements.
« Il est important de relever ce défi de transfert à grande échelle de ces technologies pour que les producteurs et les acteurs de la chaîne de valeur puisse les utiliser pour accroître leurs productions et mieux contribuer aux questions de sécurité et de souveraineté alimentaire qui constituent aujourd’hui un défi pour les économies africaines », a affirmé l’agroéconomiste principale de la Banque mondiale à Dakar, Aïfa Fatimata Ndoye Niane.
La diffusion à grande échelle de ces nouvelles variétés permettrait de doubler la production et aiderait à résoudre les problèmes et défis de souveraineté et de sécurité alimentaires, a-t-elle renchéri.
Enfin, de Mamadou Cissokho a par ailleurs plaidé pour une implication plus importante des producteurs dans les activités de dissémination de ces innovations. « Nous sommes au début et à la fin de tous ces programmes. La difficulté est qu’ils ne partent pas de ce que sont les paysans, ce qu’ils font, ce qu’ils veulent faire et ce qu’ils savent faire, alors que c’est l’addition de leur production qui assurera l’autosuffisance alimentaire à nos pays », a-t-il conclu.
Moctar FICOU / VivAfrik