L’UE invitée à prendre des engagements lors de la COP28 pour une cuisson décarbonée en Afrique

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Le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie (IEA) Fatih Birol a exhorté l’Union européenne (UE) à soutenir une initiative pour une cuisson propre en Afrique lors de la prochaine 28 Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28) prévue du 30 novembre au 12 décembre 2023, à Dubaï aux Emirats Arabe Unis. Il s’agit du « problème numéro un » pour le continent, a-t-il confié à Euractiv lors d’un entretien.

Quatre familles africaines sur cinq (soit 70 % de la population) utiliseraient des fourneaux traditionnels au charbon ou au bois pour cuisiner, faute d’accès à des combustibles moins nocifs, a fait valoir l’IEA.

Sous un autre registre, les statistiques stipulent que dans les pays africains, la cuisson représente jusqu’à 80% de ces émissions. Près de 500 000 personnes meurent prématurément en Afrique subsaharienne à cause de la pollution atmosphérique des maisons, due en très grande partie aux modes de cuisson.

Selon l’agence, les fumées nocives dégagées par ces fourneaux causeraient 3,7 millions de décès prématurés par an et toucheraient principalement les femmes et les enfants.

« Ils sont en train de mourir », a déploré le Dr Birol dans un entretien exclusif accordé à nos confrères de Euractiv, rappelant qu’il s’agit « d’une question de santé, de genre, mais aussi d’un problème énergétique et climatique majeur ».

D’après un rapport de la Banque mondiale publié en 2022, le mode de cuisson a un impact plus fort qu’on ne l’imagine sur les populations et sur l’environnement.

« Aujourd’hui en Afrique, la priorité numéro un concernant l’énergie et le climat est la cuisson propre », a ajouté le Dr Biro.

A len croire, le problème pourrait être résolu aisément en aidant les familles du continent à adopter des solutions de cuisson propres. « Régler ce problème une fois pour toutes coûterait 4 milliards d’euros », « Et aujourd’hui, l’Aide publique au développement (APD) européenne totale pour l’Afrique est de 25 milliards d’euros », a-t-il poursuivi à Euractiv.

« C’est la proposition dont je ferai part aux responsables de la Commission européenne à Bruxelles et à d’autres dirigeants européens dans les prochaines semaines », a annoncé le directeur de l’IEA qui précise que cette suggestion avait été évoquée lors de discussions avec plusieurs dirigeants africains, du Kenya ou du Sénégal notamment.

Un lourd bilan sanitaire et environnemental

La fumée de ces biocombustibles pollue l’intérieur des maisons, causant entre 2,5 et 4 millions de décès prématurés par an (plus que le paludisme, le VIH et la tuberculose), dont au moins 500 000 en Afrique subsaharienne. Elle provoque des troubles respiratoires aigus, des maladies cardiaques, des cancers, des cataractes… Les femmes, qui cuisinent au feu de bois ou au charbon, ainsi que leurs enfants sont les plus exposés à cette pollution intérieure. Ces pratiques contribuent aussi à une déforestation massive. En zone urbaine, les familles optent le plus souvent pour le charbon de bois produit à partir de l’exploitation anarchique des forêts environnantes. Dans les campagnes, la collecte du bois de chauffe implique de longues corvées quotidiennes, notamment pour les femmes et les filles, ce qui se traduit par des opportunités éducatives et économiques perdues.

Les méthodes de cuisson traditionnelles au bois ou au charbon de bois contribuent à la déforestation, entraînant chaque année la disparition de forêts de la taille de l’Irlande, selon l’IEA.

«  Cela provoque la déforestation et compromet les écosystèmes forestiers de l’Afrique, en particulier leur capacité à absorber le CO2 », a expliqué le Dr Birol, ce qui contribue à aggraver la crise climatique.

« Si l’UE aide l’Afrique à résoudre ce problème, elle renforcera la confiance entre l’Europe et l’Afrique, car l’Afrique s’en souviendra. Et l’image de l’Europe en Afrique changera », a-t-il déclaré.

L’accès universel à la cuisson propre permettrait d’éviter l’émission de 1,5 gigatonne d’équivalent CO2 par an, a clarifié l’agence, renseignant que l’Afrique représenterait près des deux tiers de ces réductions d’émissions, soit environ 900 millions de tonnes d’équivalent CO2.

La proposition de l’IEA à l’UE a été accueillie favorablement par Sani Ayouba des Jeunes Volontaires pour l’Environnement du Niger, une organisation de la société civile en collaboration avec l’organisation caritative Oxfam au Niger.

«  Le développement et le soutien d’initiatives pour la cuisson propre en Afrique contribueront non seulement à réduire les inégalités dont souffrent les femmes, mais aussi à améliorer leur santé, à renforcer leur autonomie et à réduire leur empreinte sur les ressources en bois-énergie », a-t-il expliqué à Euractiv.

La promotion de la cuisson propre en Afrique peut avoir un impact significatif sur le continent, car cette question affecte la vie quotidienne des femmes, qui représentent la majeure partie de la population, ajouté M. Ayouba.

Pour la Clean Cooking Alliance, une organisation à but non lucratif basée aux États-Unis, les femmes et les enfants de ces régions passent jusqu’à 20 heures par semaine à ramasser du bois pour préparer les repas de leurs familles.

Suffisant pour Sani Ayouba des Jeunes Volontaires pour l’Environnement du Niger de renchérir que « c’est aussi l’occasion de renforcer la résilience à la crise climatique en Afrique », soulignant la position maîtresse du secteur de l’énergie dans la lutte contre le changement climatique dans le monde entier.

L’IEA estime que près d’une personne sur trois ayant accès à la cuisson propre en Afrique d’ici à 2030 le fera grâce au Gaz de pétrole liquéfié (GPL), et une sur huit grâce à l’électricité.

Moctar FICOU / VivAfrik

Avec Euractiv

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