La culture de l’arachide a pris le pas sur celle du cannabis dans le Fogny, la partie nord du département de Bignona, dans la région de Ziguinchor, à la faveur de la pacification de la zone, jadis chasse gardée des membres du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC).
Dans les champs, où jusqu’à une récente date le cannabis était cultivé, l’arachide est en train de supplanter la culture de cette plante prohibée.
Un juste retour à la normale dans le Fogny qui avait été toujours considéré comme une zone de culture de l’arachide avant que le conflit armé ayant secoué la Casamance ne gagna en ampleur. En raison de cette crise, cette partie du département de Bignona était devenue la chasse gardée de combattants du MFDC, un mouvement irrédentiste qui a aujourd’hui quasiment été militairement vaincue.
Au plus fort de la crise, les populations locales, composées majoritairement de producteurs agricoles, avaient fui la localité gagnée par l’insécurité.
Le Fogny, vidé de ses agriculteurs arachidiers, la culture du cannabis, auparavant timide, s’était alors intensifiée du fait de l’insécurité. La localité avait fini par devenir une zone de non-droit.
Des revenus « importants et licites »
« Des champs de cannabis s’étendaient sur plusieurs hectares et étaient exploités par des éléments de la rébellion ou des groupes affiliés aux combattants du MFDC dans cette partie sud du pays », se souvient un interlocuteur qui s’est confié à nos confrères de l’Agence de presse sénégalaise (APS).
Un autre ayant accepté de témoigner dans l’anonymat a souligné que « les nombreuses opérations de ratissage effectuées par l’armée, combinées à l’installation de cantonnements militaires dans plusieurs parties du Fogny, ont eu raison de la culture du cannabis ».
Aujourd’hui, à Djibidione, par exemple, des champs d’arachide ornent à perte de vue le décor dans plusieurs localités de cette commune située dans l’arrondissement de Sindian. De même que tout le département de Bignona.
Sur le choix de se consacrer dorénavant à la culture de l’arachide, les populations locales interrogées par l’APS, insistent sur l’importance et le caractère licite des revenus tirés de la commercialisation de la légumineuse par les paysans.
« Changement de mentalité »
« C’est un changement de comportement qui est en train aujourd’hui de s’opérer au niveau du Fogny par rapport aux pratiques illicites », croit savoir le maire de Djibidione, Lamine Diémé.
Selon lui, cette prise de conscience des communautés locales est favorisée, non seulement par la présence de l’armée dans la zone, mais également par des campagnes de sensibilisation menées par les équipes municipales, de concert avec les chefs de villages et les groupements de jeunesse.
« En effet, beaucoup de gens dans la population locale ignoraient que la culture et la vente de cannabis étaient illicites. En plus, disaient-elles, c’est plus rentable que la culture de l’arachide », confie, à l’APS, M. Diémé.
Aujourd’hui, l’édile de Djibidione se dit heureux de voir que cette tendance s’est inversée considérablement au niveau de plusieurs localités de sa commune, où la culture de l’arachide devient à nouveau attractive.
Plaidoyer pour du matériel agricole
« Pour montrer l’exemple, j’ai moi-même cultivé 5 hectares d’arachide cette année », s’est-il réjoui.
Toutefois, M. Diémé invite l’État à davantage mettre les moyens pour éradiquer définitivement le peu qui reste de la culture du cannabis dans cette zone.
« Il y a certes quelques résistances par rapport à cette pratique illicite, mais nous sommes déterminés à changer les mentalités et le visage de notre commune avec zéro culture de cannabis », assure-t-il.
Il plaide également pour la dotation par l’État de tracteurs et de matériels agricoles.
« Pour davantage encourager les gens à arrêter les pratiques illicites, il faudra les doter de moyens, de matériels agricoles pour leurs activités de culture de l’arachide », dit-il, reconnaissant toutefois avoir reçu suffisamment d’engrais pour la présente campagne agricole.
« Beaucoup de moyens sont mis à la disposition de l’armée pour la destruction des champs de cannabis. Nous en attendons de même concernant le domaine agricole », souhaite le maire de Djibidione.
Moctar FICOU / VivAfrik
Avec APS