Les négociants agricoles face à une crise après des années de profits records

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Le commerce mondial des produits agricoles est dominé par de grandes compagnies qui disposent d’importantes ressources financières et d’infrastructures logistiques, de stockage, de transport et de transformation. Ces entreprises contrôlent plus de la moitié du flux mondial de matières premières agricoles.

Le négociant mondial en céréales Archer Daniels Midland (ADM) a annoncé, le mardi 4 février 2025, sur son site web son intention de supprimer entre 600 et 700 emplois en 2025. Cette décision s’inscrit dans un effort global visant à réduire son exposition aux incertitudes du marché. La stratégie d’ADM comprend également une amélioration des coûts de fabrication et une réduction des dépenses pour économiser entre 500 et 750 millions de dollars sur les trois à cinq prochaines années.

Un secteur en difficulté

L’annonce d’ADM est la dernière manifestation du malaise que traversent globalement les négociants agricoles internationaux. Le temps des profits records semble bien loin pour les géants du marché des matières premières agricoles, souvent désignés sous l’acronyme « ABCD » : ADM, Bunge, Cargill et Louis Dreyfus.

Si ces entreprises tirent généralement profit de la volatilité des marchés en achetant au plus bas et en revendant au plus haut, l’année 2024 a été marquée par une forte baisse des cours agricoles. Les marchés des céréales et des oléagineux ont subi l’effet de récoltes abondantes dans plusieurs régions du monde et d’un ralentissement de la demande internationale.

Baisse des prix et des revenus

Les prix du soja, du maïs et du blé ont chuté à leur plus bas niveau depuis 2020, effaçant la flambée des prix observée après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. Cette situation a pesé sur les résultats financiers des grands négociants :

ADM a enregistré une baisse de 9,8 % de son chiffre d’affaires à 85,5 milliards de dollars en 2024, avec un bénéfice net en chute à 1,8 milliard contre 3,48 milliards un an plus tôt.

Cargill, le plus grand négociant agricole mondial, a vu ses revenus diminuer de 10 % à 160 milliards de dollars sur son exercice fiscal 2024, une première depuis 2019. Son profit net a chuté à 2,48 milliards de dollars, son plus bas niveau depuis 2015. La société a annoncé en décembre une réduction de 5 % de son effectif global (164 000 employés) dans le cadre d’une restructuration stratégique à horizon 2030.

Perspectives et facteurs de volatilité

Malgré cette situation difficile, plusieurs analystes estiment que 2025 pourrait être marquée par une volatilité accrue des marchés agricoles, en raison de plusieurs facteurs :

Conditions climatiques incertaines en Amérique du Sud (Argentine) et en Russie, où la production de blé devrait chuter de 3 millions de tonnes à 78,7 millions de tonnes, son plus bas niveau depuis 2021, selon Sovecon.

Influence des décisions politiques américaines, notamment les annonces économiques de l’administration Trump, qui pourraient impacter la valeur du dollar et donc les cours agricoles à la Bourse de Chicago.

Une domination inébranlable

Malgré ces défis, le quatuor ABCD conserve son emprise sur le commerce international des matières premières agricoles. Selon un rapport commandité par le Parlement européen et publié en novembre dernier, ces quatre acteurs ont négocié 540 millions de tonnes de denrées en 2022, soit environ 60 % du volume mondial des céréales et oléagineux échangés, d’après les données du Département américain de l’Agriculture (USDA).

Moctar FICOU / VivAfrik

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