Le Cameroun, en partenariat avec la Banque mondiale, engage des discussions pour une nouvelle initiative régionale visant à transformer le secteur forestier dans les pays du Bassin du Congo. L’objectif est de soutenir les économies forestières durables, tout en renforçant la conservation et en créant des emplois à travers la transformation locale du bois.
Le 10 septembre 2024, Jules Ndoret Ndongo, ministre des Forêts et de la Faune du Cameroun, a rencontré une délégation de la Banque mondiale dirigée par Guillemette Jaffrin, directrice adjointe des opérations au Cameroun. Cette rencontre a permis de discuter d’une nouvelle initiative régionale visant à soutenir la transformation du secteur forestier dans les pays du bassin du Congo.
S’exprimant sur ce sujet, Guillemette Jaffrin a déclaré à la radio nationale, à l’issue de l’audience que « nous commençons les discussions avec le ministère des Forêts sur une nouvelle initiative de la Banque mondiale pour soutenir les économies forestières durables dans le bassin du Congo. Ce sera une initiative régionale pour les six pays du bassin du Congo, et le Cameroun a exprimé son intérêt. Donc, nous commençons les premières discussions sur quelles activités on pourrait soutenir au Cameroun pour soutenir les économies forestières durables ».
L’objectif de cette initiative est de répondre à un double impératif : d’une part, soutenir la conservation des forêts dans une région cruciale pour la régulation du climat mondial, et d’autre part, stimuler la croissance économique en investissant dans des installations de transformation du bois, a confié Guillemette Jaffrin. Actuellement, une grande partie du bois extrait de cette zone est exportée sous forme brute, limitant les bénéfices économiques pour les pays producteurs. En favorisant la transformation locale, le Cameroun espère créer des emplois, renforcer les chaînes de valeur et réduire la déforestation.
L’initiative couvrira le Cameroun, la Centrafrique, la République démocratique du Congo (RDC), le Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon. Le bassin du Congo, souvent désigné comme le « poumon de l’Afrique », joue un rôle vital dans la régulation du climat mondial en absorbant chaque année une quantité de dioxyde de carbone six fois supérieure à celle de la forêt amazonienne, d’après les experts.
Cependant, la déforestation et l’exploitation illégale des ressources mettent en péril ce massif forestier, compromettant sa capacité à lutter contre le changement climatique et à soutenir les moyens de subsistance de millions de personnes. La rencontre visait notamment à établir les priorités pour la transformation locale du bois et à soutenir le développement du secteur privé afin de dynamiser l’ensemble du secteur au Cameroun.
Actuellement, une grande partie du bois extrait du bassin du Congo est exportée sous forme de grumes brutes, ce qui limite les revenus et les opportunités d’emploi local, insiste la Banque mondiale. En investissant dans la gestion durable des forêts et dans des installations de transformation à valeur ajoutée, l’institution financière estime que les pays de la sous-région peuvent créer des emplois, stimuler la croissance économique et réduire la déforestation.
Signalons que le bassin du Congo, souvent surnommé « le poumon de l’Afrique », absorbe chaque année une quantité de dioxyde de carbone six fois supérieure à celle de la forêt amazonienne, selon les experts. Cependant, la déforestation et l’exploitation illégale mettent en péril cet écosystème unique. La nouvelle initiative régionale, en cours de discussion, ambitionne de contrer ces menaces en renforçant les capacités des pays du Bassin du Congo à gérer durablement leurs ressources forestières.
Rappelons qu’en avril 2024, le ministre des Forêts et de la Faune a signé un arrêté interdisant l’exportation sous forme de grumes de 76 essences de bois afin de favoriser la transformation locale. Cette décision anticipe l’interdiction progressive des exportations de grumes, qui sera instaurée par les pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) notamment le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Tchad et la République centrafricaine (RCA) ainsi que par la République démocratique du Congo (RDC) à partir de 2025, avec une entrée en vigueur totale prévue pour 2028.
Depuis près de dix ans, le Cameroun a commencé à imposer des surtaxes sur les exportations de bois en grumes et de bois peu transformés (comme les sciages) en préparation à cette interdiction. Selon le ministre des Forêts, la liste des essences interdites d’exportation devrait s’élargir progressivement au fil des années. L’objectif est de « minimiser les impacts négatifs immédiats sur les recettes liées à la mise en œuvre de cette décision et de se concentrer sur les avantages économiques et financiers de la transformation locale », a expliqué Jules Doret Ndongo.
La Banque mondiale, par le biais de cette initiative, entend également améliorer la gouvernance forestière et encourager la mobilisation des investissements privés. Le secteur forestier représente jusqu’à 9 % du Produit intérieur brut (PIB) des pays du bassin du Congo et emploie entre 300 000 et 500 000 personnes, selon la Banque mondiale.
Le Center for Global Development estime que les services de séquestration du carbone fournis par cette forêt sont évalués à environ 55 milliards de dollars par an, représentant 36 % du PIB de la région en 2021.
À travers cette initiative, la Banque mondiale ambitionne donc de renforcer son soutien aux écosystèmes forestiers via son programme mondial de défi pour les forêts. Cette initiative vise aussi à améliorer la gouvernance, le respect des normes internationales et la création d’un environnement propice à la mobilisation des investissements du secteur privé.
En parallèle, elle s’attaquera à la protection des forêts à haute valeur de conservation et à la biodiversité dans le deuxième plus grand massif forestier tropical intact du monde. Tout comme elle cherchera aussi à améliorer la qualité de vie des communautés locales en clarifiant le régime foncier, en sécurisant les droits forestiers et en facilitant l’accès à une énergie de cuisson propre.
Ainsi, cette collaboration entre le Cameroun et la Banque mondiale marque un pas important vers une exploitation plus responsable des ressources naturelles du Bassin du Congo, tout en conciliant conservation environnementale et développement économique.
Moctar FICOU / VivAfrik