Sommet africain de l’énergie : Entretien avec Franz Drees-Gross, directeur régional pour l’infrastructure en Afrique de l’Ouest et centrale à la Banque mondiale

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En prélude du Sommet africain de l’énergie qui se tiendra les 27 et 28 janvier 2025 à Dar es Salaam, en Tanzanie, organisé par le Groupe de la Banque mondiale et le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), Franz Drees-Gross, directeur régional pour l’infrastructure en Afrique de l’Ouest et centrale à la Banque mondiale, a souligné l’urgence d’agir face à la crise énergétique qui touche le continent. Dans une interview exclusive, il a défini la Mission 300 comme bien plus qu’un simple objectif de raccordement : un véritable mouvement pour offrir à 300 millions d’Africains l’accès à l’électricité d’ici à 2030, avec des solutions innovantes et durables. Pour lui, cette initiative vise à créer un impact durable, essentiel pour la croissance de l’Afrique et l’amélioration des conditions de vie des millions de personnes privées d’accès à l’énergie. « L’heure est venue d’agir », a-t-il martelé, appelant à une mobilisation collective pour transformer le paysage énergétique du continent.

Monsieur Franz Drees-Gross, vous avez récemment déclaré que « l’heure est venue d’agir » et que la Mission 300 représente un mouvement et un impact durable pour l’Afrique. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce projet et pourquoi il est crucial à ce moment précis ?

La Mission 300 est bien plus qu’un objectif ; c’est une véritable initiative stratégique pour répondre à une crise énergétique qui touche des millions de personnes en Afrique. Nous avons aujourd’hui une occasion unique de transformer le paysage énergétique du continent. L’objectif de connecter 300 millions d’Africains à l’électricité d’ici 2030 est ambitieux, mais nécessaire. L’Afrique souffre d’un déficit énergétique massif et ce manque d’accès à l’électricité limite non seulement le développement économique, mais empêche aussi l’accès aux services de base essentiels comme l’éducation, la santé et l’eau potable. Cette initiative vise à créer un impact durable en fournissant à des millions de personnes l’accès à l’énergie et en facilitant la transition vers des solutions énergétiques plus propres et plus durables.

Vous parlez de transformation, mais comment comptez-vous surmonter les défis liés à l’infrastructure énergétique actuelle du continent, qui est souvent obsolète ou insuffisante ?

Vous avez raison de souligner que les infrastructures actuelles sont souvent inadéquates pour répondre aux besoins de la population. C’est pourquoi la Mission 300 s’appuie sur une approche innovante. D’une part, nous prévoyons de renforcer les infrastructures existantes, en améliorant les réseaux électriques traditionnels. D’autre part, nous mettons également l’accent sur des solutions alternatives, telles que les énergies renouvelables décentralisées et les technologies hors réseau, pour desservir les zones rurales et éloignées. Nous voulons garantir que les solutions apportées soient non seulement efficaces, mais aussi adaptées aux réalités locales. Cela implique de soutenir les énergies solaires, éoliennes et l’hydroélectricité à petite échelle, afin d’avoir un mix énergétique diversifié et résilient.

Vous avez mentionné les énergies renouvelables. Quel rôle ces technologies joueront-elles dans le cadre de la Mission 300 ?

Franz Drees-Gross : Les énergies renouvelables sont au cœur de la Mission 300. Elles représentent une solution viable pour l’avenir de l’Afrique, car elles permettent non seulement d’augmenter l’accès à l’électricité, mais aussi de le faire de manière durable. Le continent est extrêmement bien placé pour exploiter des ressources renouvelables, notamment le solaire, grâce à l’ensoleillement intense dont il bénéficie, mais aussi les énergies éoliennes et l’hydroélectricité. Nous avons des solutions décentralisées qui ne nécessitent pas des infrastructures coûteuses et difficiles à déployer, ce qui nous permet d’atteindre plus rapidement des zones reculées. L’intégration de ces technologies est essentielle pour accélérer la transition énergétique et pour limiter l’impact environnemental des solutions énergétiques traditionnelles.

En ce qui concerne les financements, la Mission 300 nécessite des investissements massifs. Comment prévoyez-vous de mobiliser ces ressources et de garantir une mise en œuvre efficace ?

C’est l’un des principaux défis auxquels nous faisons face, et c’est là que la coopération internationale est cruciale. La Banque mondiale, en collaboration avec la Banque africaine de développement et d’autres partenaires, met en place des mécanismes financiers novateurs pour mobiliser les investissements nécessaires. Cela inclut des partenariats public-privé, des instruments de financement flexibles, et une collaboration étroite avec des donateurs et des institutions financières internationales. Nous devons également encourager les investissements privés dans les solutions énergétiques, notamment les entreprises locales qui développent des technologies renouvelables. Il s’agit de créer un environnement propice à l’investissement à long terme, tout en soutenant les projets locaux et en garantissant que les fonds sont utilisés de manière transparente et efficace.

Vous parlez d’un impact durable. Quels sont les critères de succès que vous surveillez pour évaluer si la Mission 300 atteint ses objectifs d’ici à 2030 ?

Le succès de la Mission 300 sera mesuré par plusieurs indicateurs clés. Bien sûr, le nombre de personnes connectées à l’électricité est un objectif fondamental, mais nous devons également regarder la qualité de l’accès à l’énergie. Cela signifie que l’énergie doit être abordable, fiable et durable. Un autre critère important sera l’inclusivité du projet : comment les populations vulnérables, les femmes, et les communautés rurales sont-elles impliquées dans ces initiatives ? Enfin, nous évaluerons l’impact socio-économique de l’accès à l’énergie, notamment en termes de création d’emplois, d’amélioration des services de santé et d’éducation, et de réduction de la pauvreté. Ce sont ces critères qui garantiront que nous ne faisons pas qu’atteindre un objectif quantitatif, mais que nous créons des transformations profondes et durables pour les populations africaines.

En conclusion, quel message souhaiteriez-vous transmettre aux jeunes générations africaines au sujet de la Mission 300 et de l’avenir énergétique de l’Afrique ?

Je dirais que la Mission 300 est avant tout un appel à l’action pour les jeunes générations. L’avenir énergétique de l’Afrique leur appartient. En créant des solutions énergétiques durables, nous ouvrons des opportunités immenses pour l’innovation, la création d’emplois, et la construction d’un avenir plus équitable. Les jeunes sont les véritables moteurs du changement. En les impliquant dans des initiatives comme celles-ci, nous leur donnons la possibilité de transformer leur avenir et celui du continent. L’heure est venue de prendre les choses en main et de bâtir ensemble un avenir énergétique plus inclusif et plus vert pour l’Afrique.

Moctar ICOU / VivAfrik

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