Une fuite de gaz a été détectée sur le puits A02 du projet Grand Tortue Ahmeyim (GTA), un gisement offshore situé à la frontière maritime entre le Sénégal et la Mauritanie le mercredi 19 février 2025. Cet incident survient moins de deux mois après le lancement officiel de la production, le 31 décembre 2024, et suscite de nombreuses questions : faut-il s’inquiéter pour l’avenir du projet ? Quels sont les risques environnementaux et les impacts potentiels pour les populations locales ?
BP et l’incident de la fuite de gaz : une communication rassurante mais incomplète
Dans un communiqué, BP, l’opérateur principal du projet aux côtés de Petrosen, Kosmos Energy et la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH), a annoncé avoir « découvert des bulles de gaz sous-marines à faible débit » sur le puits A02. Selon la compagnie britannique, bien que la fuite soit faible, l’impact environnemental devrait être « négligeable » grâce aux caractéristiques du gaz et des condensats impliqués. De plus, la société assure que la sécurité des employés n’est pas en danger. Les trois autres puits du site continuent de produire pendant les réparations, ce qui permet de maintenir l’approvisionnement.
Cependant, cette déclaration rassurante contraste avec le silence des autorités sénégalaises et soulève des interrogations, notamment concernant la transparence des informations sur la gestion de la situation.
Les préoccupations environnementales : des impacts potentiels sur l’écosystème marin
Le projet GTA se situe dans une zone clé pour les pêcheurs sénégalais. Même une faible fuite de gaz pourrait perturber l’équilibre fragile de l’écosystème marin local, menaçant ainsi les populations qui dépendent de la pêche pour leur subsistance. Aliou Ba Coulibaly, représentant de l’association mauritanienne Publiez ce que vous payez (PCQVP), a souligné à l’AFP que bien que les études d’impact environnemental aient anticipé ce type d’incident, personne ne s’attendait à une fuite aussi précoce.
Le gaz qui s’échappe contient du méthane, un puissant gaz à effet de serre. L’impact de cette fuite pourrait aggraver le réchauffement climatique, déjà une préoccupation majeure pour le Sénégal, un pays particulièrement vulnérable aux catastrophes climatiques telles que les inondations et la sécheresse. En cas d’aggravation de la fuite, la sécurité des populations riveraines, notamment près de Saint-Louis, pourrait également être mise en danger.
L’absence de communication officielle : un point de tension
Ce qui inquiète également les observateurs, c’est le manque d’information officielle. LEGS-Africa, un think tank sénégalais, a exprimé dans un communiqué l’urgence de fournir des informations transparentes et détaillées sur les causes, l’ampleur et les impacts de cette fuite. Pourquoi Petrosen et l’État sénégalais restent-ils muets face aux préoccupations des citoyens ?
Les ONG et la société civile appellent à une communication claire et à des mesures concrètes pour éviter que ce projet stratégique ne se transforme en source de désillusion pour les populations locales. Aliou Ba Coulibaly rappelle que si des risques avaient été anticipés dans les études, la fuite est intervenue beaucoup plus tôt que prévu, soulignant le manque de préparation face à un projet d’une telle envergure.
Un appel à la transparence et à l’action
Alors que le projet GTA pourrait représenter un atout économique majeur pour le Sénégal, la fuite de gaz soulève de nombreuses questions sur la gestion environnementale et la communication autour de ce projet. Le gouvernement, Petrosen et BP doivent apporter des réponses claires et transparentes pour rassurer la population et garantir que les impacts de cette fuite ne seront pas néfastes pour l’environnement et les communautés locales. Les attentes en matière de responsabilité et de communication sont élevées, et le projet GTA devra prouver qu’il peut se développer de manière durable et bénéfique pour tous.
Moctar FICOU / VivAfrik
