L’Afrique face aux pertes agricoles dues aux problèmes de stockage

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Le continent africain est touché par de multiples problématiques qui impactent sa sécurité alimentaire notamment la crise du Covid-19, le changement climatique, les conflits…. Dans ce contexte, les questions de qualité de semences ou d’engrais sont souvent évoquées. Celle du stockage plus rarement, alors qu’elle est hautement stratégique.

En effet, des productions agricoles mal stockées sont sujettes à de nombreux risques. « Vous pouvez produire, mettre ça en stockage et un aléa arrive », a illustré Djibril Diop, un inspecteur à la Compagnie nationale d’assurance agricole du Sénégal et témoin des dégâts récurrents. « Les rongeurs peuvent arriver si c’est mal entreposé et déprécier la marchandise. Du coup, la valeur marchande diminue », a-t-il argumenté.

Le témoin des dégâts récurrents a ajouté qu’« il est donc dans l’intérêt du producteur qui a trimé pendant des jours, des mois ou bien des années, au terme de sa production et dans l’attente des dividendes de son action, de bien couvrir cela pour que les résultats ne soient pas biaisés, afin que quand le sinistre arrive, cet événement aléatoire que personne ne maîtrise, qu’il soit indemnisé ».

Pour sa part, Mireille Mogena, à la tête d’un cabinet de conseil qui travaille notamment sur les thématiques agricoles au Tchad a souligné que ces problèmes de stockage se ressentent dans le quotidien des populations. « Pendant les périodes de soudure, on voit que les prix flambent et on se demande pourquoi les prix flambent. Parfois, on a l’impression que les producteurs ont stocké pour faire de la surenchère. Mais parfois non. Justement, ils n’ont pas forcément stocké, mais ils ont cette problématique de pouvoir trouver des lieux de stockage. Donc, c’est un peu une double peine », a-t-elle souligné.

En Côte d’Ivoire, un programme de prélèvement et de construction

Des problèmes de stockage qui ont clairement été identifiés et estimés par les autorités ivoiriennes. Entre 30 et 60% des récoltes sont ainsi perdues faute de bons lieux de stockages chaque année, pour un coût évalué à 40 milliards de francs CFA. « Ne serait-ce que pour la moitié des 23 spéculations que nous avons, afin de stocker la moitié, nous avons besoin d’un peu plus de 2 000 entrepôts. Ça fait un investissement d’environ 5 milliards d’euros dans toutes les zones de production », détaille Koffi Ngoran, le directeur général de l’Autorité de régulation des récépissés d’entreposage.

Poursuivant ses explications, Koffi Ngoran a encore détaillé que « ce n’est pas reluisant par exemple d’entendre dire que la meilleure qualité de l’anacarde vient du Bénin. Alors qu’eux, ils produisent à peine 150 000 tonnes et nous sommes à plus d’un 1,3 million de tonnes. Et donc évidemment, s’il y a un stockage intelligent, avec un traitement manutentionnaire adéquat, s’il est possible de faire la surveillance 24 heures sur 24 avec un système électronique qui a des capteurs sur l’humidité, sur l’intrusion et sur la contamination des produits, ça permet de faire un bond ».

Face à cette problématique, et dans l’objectif d’avoir moins de pertes et d’assurer la qualité des produits agricoles, les Ivoiriens ont engagé une politique de prélèvements pour permettre le développement de ces structures de stockage. Un projet de construction de 108 entrepôts est en cours.

Moctar FICOU / VivAfrik

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