Derrière la loi foncière en préparation, la méfiance des défenseurs de l’agriculture familiale au menu des échanges à Madagascar  

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L’atelier de quatre jours, organisé par le ministère de la Décentralisation et de l’Aménagement du territoire malgache pour préparer la future loi foncière a pris fin le week-end dernier. Une nouvelle loi qui vise à affirmer la propriété de l’État sur certains terrains et à poursuivre la protection légale des terres des petits paysans. Une réforme qui soulève aussi des inquiétudes.    

Rappelons que depuis 2022, l’État malgache s’est considérablement investi pour sécuriser les parcelles des paysans. Une loi leur permet en effet d’obtenir un certificat foncier pour les terres qu’ils cultivent et valorisent depuis plus de cinq ans. Ce certificat est délivré par les communes et reconnait légalement la propriété. Plus d’1,4 million de ces certificats ont été délivrés récemment (projet Casef financé par la Banque mondiale).

Désormais, l’État souhaite également sécuriser des terrains en son nom. En janvier 2024, le conseil des ministres a donc décidé d’amender la loi 2008-014 qui régit le domaine privé de l’État. « L’enjeu c’est que l’État malagache puisse savoir quels sont les terrains qui lui appartiennent », a expliqué Mamin’ Ny Aina Rakotobe Lydson, la directrice des domaines et de la propriété foncière, au sein du ministère de la Décentralisation et de l’Aménagement du territoire.

A l’en croire, il s’agit pour l’État d’identifier les terrains et de mieux en contrôler les usages. « L’idée, c’est de sécuriser le domaine de l’État pour éviter sa dilapidation ».

Mais ces dernières orientations inquiètent la société civile. Les organisations de défense de l’agriculture familiale souhaiteraient être associées plus largement au processus de réécriture de la loi. Elles craignent, assurent-elles à RFI, que cette réforme de sécurisation foncière, sous couvert de vouloir inventorier les terrains de l’État, ne cache en fait une volonté d’identifier des terres – peut-être déjà appropriées localement – et de les réserver à des investisseurs, nationaux ou internationaux. Et non aux millions de ménages malgaches qui vivent de l’agriculture (70% de la population, selon le rapport sur la pauvreté de 2024 de la Banque mondiale).

À Madagascar, le besoin en terres pour les paysans est massif, encore plus pour les jeunes. Chaque année, 700 000 jeunes arrivent sur le marché du travail et 80% d’entre eux se tournent vers l’agriculture. Plus de 250 000 exploitations se créent chaque année et ont besoin de parcelles à cultiver. Les organisations de défense du paysannat espèrent que l’État appuiera ces jeunes en priorité.       

Moctar FICOU / VivAfrik

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